Cela fait cinq ans que nous sommes entrés dans l'ère de l'astronomie gravitationnelle avec Ligo et Virgo. La chasse aux fusions de trous noirs et d'étoiles à neutrons a été bonne et elle ne fait que commencer avec déjà 50 collisions de ces astres compacts détectées. Elles apportent des renseignements nouveaux sur les populations de trous noirs mais surtout renouvellent notre quête d'une nouvelle physique au-delà de la relativité générale en testant ses prédictions.
Deux prix Nobel de physique ont récemment récompensé des pionniers de l'exploration théorique et expérimentale des prédictions de la théorie de la relativité générale avec, parmi eux, Kip Thorne et Roger Penrose. Sir Roger est plus connu par ses travaux sur les trous noirs que par ceux sur les ondes gravitationnelles et pourtant ils existent et ont même été utilisés par un autre prix Nobel de Physique, Subrahmanyan Chandrasekhar, en conjonction avec ses derniers travaux sur les trous noirs. On doit certainement s'attendre à d'autres prix Nobel dans le domaine de l'astronomie des ondes gravitationnelles dont l'ère a commencé le 14 septembre 2015 (d'où le nom de cet évènement : GW150914, car GW est l'acronyme de Gravitational Wave, en anglais), lorsque les membres de la collaboration Virgo et ceux de Ligo se sont rapidement aperçus que le signal détecté par Ligo provenait des derniers évènements survenant quand deux trous noirs de masse stellaire, formant un couple binaire, se rapprochent en suivant une spirale, puis fusionnent en un seul astre compact (voir la vidéo ci-dessus et ci-dessous). On sait de plus que la France et l'Italie sont très impliquées théoriquement et observationnellement dans l'étude des ondes gravitationnelles avec le détecteur Virgo, comme le prouve l'attribution d'une des médailles d’or du CNRS à Alain Brillet et Thibault Damour, ainsi que l'existence d'importantes équipes travaillant dans des laboratoires comme le LAPP (Laboratoire d’Annecy de Physique des Particules) ou encore celui de l'Observatoire de la Côte d'Azur (OCA) à Nice, Artemis.
Futura en a profité pour interviewer plusieurs fois l'un des membres d'Artemis, l'astrophysicien Olivier Minazzoli, travaillant également au centre scientifique de Monaco. Il nous avait, par exemple, apporté plusieurs explications concernant la possibilité de tester la théorie des supercordes avec Virgo et Ligo ainsi que sur la possibilité d'obtenir une preuve extrêmement convaincante de l’existence des trous noirs en mettant en évidence l'influence de ce que l'on appelle leurs modes quasi normaux sur le spectre des ondes gravitationnelles résultant de la fusion de deux trous noirs.
Une centaine de trous noirs en collisions ? Tout récemment, les membres de la collaboration Ligo et virgo ont fait savoir qu'ils avaient publié la dernière mise à jour du catalogue des ondes gravitationnelles détectées avec ces instruments. Il est appelé GWTC-2 (en anglais, Gravitational-Wave Transient Catalog 2), ou encore Catalogue O3a, et il recense toutes les sources confirmées depuis la première en 2015 jusqu'à la fin de la première moitié de la troisième campagne de prise de données, le fameux « run O3 », qui avait débuté le 1er avril avant de se terminer le 1er octobre de cette même année 2019.
Le nombre de détections a grimpé et l'exploitation des mesures s'est faite plus précise suite aux upgrades des détecteurs qui ont eu lieu avant le run O3, notamment dans le cas de Virgo avec l'utilisation d'une technique d'optique quantique faisant appel aux « états compressés de la lumière ». Au total, 39 sources supplémentaires ont été découvertes s'ajoutant aux 11 précédentes mises en évidence. Il s'agit très majoritairement de collisions entre deux trous noirs dans un système binaire, de collisions d'étoiles à neutrons mais, pour le moment, d'aucune rencontre catastrophique entre un trou noir et une étoile à neutrons, ou plus exactement, d'aucune dont nous ayons une preuve convaincante
Les premières détections avaient permis de poser de nouvelles contraintes sur la théorie de la relativité générale et des théories alternatives proposées ainsi que sur l'existence des trous noirs prédits par la théorie d'Einstein, qui doivent avoir un espace-temps qui se comporte selon la fameuse métrique de Kerr pour un trou noir en rotation et ses perturbations sous l'effet d'actions physiques extérieures. Les nouvelles font de même mais elles permettent également de poser des contraintes sur les populations d'astres compacts, que ce soit sur le nombre de binaires de trous noirs ou sur l'état de la matière dans les étoiles à neutrons, par exemple sous forme du mythique plasma de quarks-gluons, le quagma. Trois articles sur arXiv permettent d’en savoir plus à ce sujet ainsi que les communiqués en français des collaborations Ligo-Virgo.
Mais avant d'entrer dans le vif du sujet à ce propos, c'est une excellente occasion de faire un peu de publicité à un ouvrage destiné aux enfants et qui parle de l’astronomie des ondes gravitationnelles. On le doit à deux spécialistes réputées de cette nouvelle science : Tania Regimbau et Mairi Sakellariadou. Voici leur courte présentation de l'ouvrage.
« L'idée de ce livre est née sur une plage, à Nice, en septembre 2017, deux ans après la première détection des ondes gravitationnelles. Cette découverte a ébranlé le monde scientifique, étant la confirmation ultime de la théorie d'Albert Einstein mais également parce qu'elle a marqué le début d'une nouvelle ère en astrophysique. La détection des ondes gravitationnelles a été récompensée par le prix Nobel de physique 2017.
Étant toutes deux membres de la collaboration qui a fait cette découverte, nous avons éprouvé le désir de la transmettre aux enfants. Nous avons alors imaginé un conte de l'espace mettant en scène deux étoiles jumelles qui s'aimaient tellement qu'elles ont fusionné pour rester toujours ensemble.
Source : https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/ondes-gravitationnelles-ondes-gravitationnelles-dizaines-collisions-trous-noirs-testent-relativite-generale-83969/
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