L'Agence spatiale européenne (ESA) vient de diffuser la première image acquise par la caméra Cassis, de l'orbiteur TGO (mission ExoMars), depuis sa position définitive autour de Mars. On y voit la crête d'un cratère d'impact appelé Korolev et situé à côté du pôle nord martien.
Après avoir terminé son aérofreinage autour de Mars fin février 2018, la sonde TGO, de l'Agence spatiale européenne (ESA), se trouve maintenant sur une orbite circulaire située à 400 kilomètres d'altitude et inclinée à 74° avec une période de révolution de deux heures. Cet orbiteur a débuté ses observations scientifiques. L'Agence spatiale européenne vient de rendre publique une première image prise le 15 avril depuis sa position définitive et qui est d'intérêt scientifique (les précédentes images, acquises depuis des altitudes plus élevées, avaient aussi un intérêt scientifique mais elles n'exploitaient pas tout le potentiel de cette caméra).
Cette image est la crête d'un cratère d'impact qui s'appelle Korolev et qui se situe à côté du pôle nord martien. Elle a été acquise par la caméra Cassis, qui permet des prises de vue en couleurs en stéréo et utilise les deux images obtenues en même temps pour reconstruire la topographie des lieux. Cette image a une résolution de 5 mètres. Une résolution aussi faible peut surprendre quand on sait que la caméra HiRise, de la sonde MRO (Nasa), permet de voir des rochers de moins de un mètre. Mais il faut savoir que Cassis n'a pas été conçue pour réaliser des vues avec une très haute résolution.
Pour rappel, les premières lumières de la caméra Cassis datent de novembre 2016 mais elles avaient surtout pour but de s'assurer du bon fonctionnement de l'appareil. Cassis est utilisée comment caméra de contexte pour compléter les données des autres instruments de la sonde. Par exemple, si TGO détecte des traces de méthane et d'autres gaz, Cassis sera utilisée pour identifier la source.
Le cratère Korolev et ses dépôts de glace
Ce cratère n'est pas aussi anodin qu'il y paraît. D'ailleurs, Susan Conway, scientifique associé pour Cassis au Laboratoire de Planétologie et Géodynamique de Nantes, qui nous avait commenté les premières lumières de la caméra, l'a déjà étudié dans le passé et avait publié un article scientifique en 2012 (voir ici). Comme elle nous l'explique, le cratère Korolev est particulier puisqu'il « contient des dépôts de glace épaisse ressemblant à ceux qui constituent la calotte nord, mais en forme de bosses ».
Cette image est donc intéressante parce qu'on approche de l'automne dans l'hémisphère nord et « qu'on voit le versant dégelé à l'intérieur du cratère, en bas de l'image, et, au centre de l'image, un dépôt de glace d'eau pérenne sur la crête ». Les stries qu'on voit sont « probablement créées par le vent qui a transporté la glace ». Les images comme celles-ci vont permettre de « bien mieux comprendre les cycles saisonniers et comment se dépose et disparaît la glace sur la surface de Mars ».
Une façon inédite d'observer Mars
Les « premières images de Cassis sont très impressionnantes parce qu'elles sont prises très tôt le matin quand la lumière du Soleil est rasante ». Techniquement, c'est très difficile pour des images en couleurs et, scientifiquement, c'est innovant « parce que les autres sondes n'ont pas une orbite qui permet d'obtenir des images dans différentes périodes durant la journée ; c'est donc un atout unique pour Cassis ».
Ces prises de vue le matin et le soir vont permettre aux scientifiques de « mieux comprendre le lien entre les dépôts des givres (saisonniers et journaliers) et des processus que nous voyons en train de sculpter la surface actuellement ». Ces givres peuvent être de la glace carbonique ou bien de l'eau et nous comprenons mal les phénomènes liés à eux, souvent nommés « exotiques » parce que nous n'avons pas un équivalent terrestre (par exemple, les jets de gaz qui sortent des fissures dans la glace).
TGO livre ses premières images
Article de Rémy Decourt publié le 30/11/2017
L'Agence spatiale européenne (ESA) vient de diffuser les premières images acquises par la caméra Cassis, de l'orbiteur TGO, de la mission ExoMars 2016. Les premières lumières de cet instrument étaient attendues avec impatience car elles permettent de s'assurer que l'appareil fonctionne bien et donnent un avant-goût des retombées scientifiques attendues.
L'atterrissage raté de Schiaparelli ne doit pas faire oublier le succès de la mise en orbite de la sonde Trace Gaz Orbiter (TGO) autour de la Planète rouge dans le cadre de la mission ExoMars 2016. Pour l'instant, la sonde n'est pas sur son orbite définitive (qui est située à quelque 400 kilomètres d'altitude et qu'elle atteindra en octobre 2017) ; elle évolue sur une orbite fortement elliptique de 250 km à 100.000 km.
L'activité scientifique ne débutera qu'à partir du mois de mai. Néanmoins, les instruments de l'orbiteur sont allumés et testés pour vérifier leur bon fonctionnement. C'est le cas de la caméra Cassis (acronyme de Colour and Stereo Surface Imaging System). Celle-ci vient d'acquérir ses premières images haute résolution de la surface de Mars depuis sa mise en orbite le 19 octobre. Ces images ont été obtenues lors du passage de la sonde à proximité du canyon Valles Marineris et des grands volcans martiens.
Cassis permet des prises de vue couleur en stéréo et utilise les deux images obtenues en même temps pour reconstruire la topographie des lieux. Ce premier lot d'images va permettre d'améliorer la qualité des prochaines prises de vue.
Nicolas Mangold, co-investigateur de l'équipe scientifique de Cassis (également directeur de recherche au CNRS, au LPG Nantes) et Susan Conway, scientifique associé pour Cassis, répondent à nos questions.
Pouvez-vous nous donner un bref descriptif technique de la caméra et nous en dire plus sur ses performances ?
Susan Conway : Cette caméra, qui permet des prises de vues couleur en stéréo, utilise un procédé capable de reconstruire la topographie à partir de deux images. Ces premières images prises par la camera et rendues publiques montrent qu'elle fonctionne bien.
Nicolas Mangold : J'ajouterais que cette caméra aura une résolution en phase d'acquisition qui sera autour de 5 m/pixel, quand l'orbite sera circularisée à 400 kilomètres d'altitude vers la fin 2017. Ces premières images sont prises alors que l'orbite est très elliptique (250 km par 100.000 km) ; elles permettent de tester les capacités de l'instrument et vont permettre d'améliorer les traitements dans le futur.
Quelles sont vos attentes en ce qui concerne le retour scientifique ?
Nicolas Mangold : Cassis n'est pas la plus précise des caméras en orbite martienne, mais elle permet une meilleure couverture spatiale de la surface. Elle va permettre de suivre l'évolution de la surface de Mars au fil des saisons, et en plus en 3D. C'est là où se situe l'innovation, car les autres caméras de cette résolution n'ont pas de mode stéréo et sont obligées de repasser au même endroit pour permettre de reconstruire la topographie. Avec Cassis, la topographie est calculée systématiquement à une résolution 10 fois supérieure à la topographie existante.
Susan Conway : À cela s'ajoute que les autres instruments de la mission ont pour but la détection des gaz à l'état de traces comme le méthane, potentiellement intéressant pour les liens exobiologiques. En cartographiant la surface de Mars, Cassis aidera notamment à localiser les sources de ces gaz à la surface. Elle nous permettra de mieux comprendre les processus actifs sur la surface de la planète et, avec sa capacité couleur, nous facilitera la détection des changements entre deux images prises consécutivement.
Cette caméra est-elle innovante par rapport à d'autres autour de Mars ? Si oui, en quoi se démarque-t-elle ?
Susan Conway : Les autres caméras haute résolution actuellement en orbite prennent leurs images à 15 heures (heure martienne). En n'ayant pas cette contrainte, Cassis permettra d'observer la surface aux autres heures de la journée martienne, ce qui sera intéressant pour mieux comprendre les processus actifs tels que les infiltrations récurrentes d'eau liquide, désignées Recurring Slope Lineae (RSL).
Permettra-t-elle d'autres avancées scientifiques ?
Nicolas Mangold : Oui. Cette caméra nous aidera également à approfondir les thématiques sur les traces d'eau, actuelle ou passée.
Susan Conway : Ainsi qu'à mieux comprendre les processus actifs à la surface de la planète ; avec sa capacité couleur, elle nous facilitera la détection des changements entre deux images prises consécutivement.
Note : L'instrument Cassis est le fruit d'une collaboration européenne entre l'université de Berne (qui héberge le principal investigateur, Nicolas Thomas), l'observatoire astronomique de Padoue et le centre spatial de Varsovie.
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Crédit : Futura Sciences
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